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Il reprit quelque peu ses esprits, et son crayon, lorsque l’inconnue louvoyant maladroitement entre les tables se détourna du chemin qui la menait à lui et, courbant le dos, se recroquevillant à chaque pas, vint timidement s’asseoir en face d’un type… miteux.

Il ne pouvait le qualifier autrement : franchement miteux. Pouilleux !

Renversé sur son siège, cuisses écartées, genou dépassant de la table, obstruant le passage sans vergogne. Un malappris !

  

Une pluie fine. Un crachin froid, sournois, enveloppant. Au sol et sur les toits avoisinants la neige fondait, le galurin emprunté abritait le crâne de Côme.

     L’homme se tenait debout, à côté d’un autre homme debout, non loin d’un imposant socle de pierre sculptée vierge de toute inscription et ne supportant aucune statue. Leurs mains se frôlèrent avant qu’ils ne se séparent. Qu’avaient-ils échangé de la sorte ?

  

Lentement, ce rythme baissa, les talons s’immobilisèrent. Mercédès étendit les bras, se secoua gracieusement, ses dentelles glissèrent sur elle, dévoilant ses épaules nues, puis son corps tout entier.

     Elle s’approcha de Côme et l’attira à elle. Ils s’embrassèrent longuement.

  

     — Qu’est-ce que c’est que cette horreur ?

     Clarisse Léonard regardait avec stupeur deux toiles gâchées posées au sol contre le mur de la chambre de Côme, ainsi que le chevalet sur lequel il achevait son œuvre : habillée de flammes, une femme dont on ne devinait pas le visage, à contre-jour, dansait le flamenco. On apercevait à ses pieds un mouvement de dentelles blanches et rouges échappées de sa robe à froufrous.

     Clarisse hocha la tête, atterrée, avant de sortir.

     — Mon pauvre Côme…

  

            — Réfléchis : on m’a surprise seule avec lui, il agonisait dans mes bras, le couteau planté dans le ventre. Personne d’autre ne se trouvait dans la maison, j’avais un mobile indiscutable, aucun juré ne croira en mon innocence.

     Il ne bougeait plus, perdant son sang, et sa vie.

     Deux vers d’Edmond Rostand déclamés avec panache par Cyrano agonisant lui revinrent en mémoire : 

      … Et samedi, vingt-six, une heure avant dîné,

           Monsieur de Bergerac est mort, assassiné.

     Ce fut sa dernière pensée.

  

     — Hélas ! le temps passe et il ne sort pas de son coma. S’il survivait, les médecins m’ont prévenue qu’il garderait… qu’il resterait… tellement diminué que…

     Elle ne termina pas sa phrase, éclata en sanglots et raccrocha.

  

     Le commissaire sortit de son attaché-case un livre, puis un autre, puis d’autres encore.

     — D’Alexandre Dumas père : Les trois mousquetaires, Vingt ans après, la Tour de Nesle, Le comte de Monte-Cristo, de Balzac : Les Chouans, de Maurice Leblanc : quelques aventures d’Arsène Lupin, dont L’Aiguille creuse, et bien entendu La Comtesse de Cagliostro.

  

     Pivotant sur lui-même, il chercha une issue : peine perdue, sortis d’une autre voiture deux autres types lui barraient le passage.

     L’homme au feutre le saisit par le bras :

     — Peter Bellaert ?

     — Oui.

     — Commissaire Bolduc.

  

     — Pile ! Encore toi le gentil, encore moi le méchant, aujourd’hui.

     Gouvion, exaspéré, avait haussé les épaules.

     — Tu triches, c’est clair.

  

     Comme dans les films.

     Clap ! Un parking immense où Côme fait les cent pas, le béton hostile mangeant le paysage et soudain la porte monumentale qui s’ouvre, Arantxa qui sort et surgissant de nulle part une longue limousine noire venant se ranger deux mètres devant elle.

     Ignorant pour un instant la limousine, elle vint droit sur Côme.

     Plus tard dans la journée un colis fut livré au domicile du commissaire Aimé Bolduc. Il contenait douze livres de la collection Hetzel, douze des voyages extraordinaires de Jules Verne : Le tour du monde en 80 jours, Michel Strogoff, De la terre à la lune, Cinq semaines en ballon, Le château des Carpates…